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L’Administration fiscale peut-elle, en application de l’article 53, 10° CIR92, rejeter les pertes reportées en invoquant le caractère déraisonnable des frais professionnels ?

15-02-24

On peut constater dans le chef de l’Administration fiscale une tendance de plus en plus fréquente à rectifier la situation fiscale des contribuables en ayant recours à l’article 53, 10° CIR 92 qui prévoit ce qui suit :

« Article 53 : Ne constituent pas des frais professionnels : (…)

10° tous frais dans la mesure où ils dépassent de manière déraisonnable les besoins professionnels ».

A défaut de définition objective de la notion de « dépassement déraisonnable », la position de l’Administration pourrait s’avérer arbitraire, d’autant plus lorsqu’elle utilise cette disposition à mauvais escient.

Premièrement, à l’examen des travaux parlementaires, l’Administration ne peut recourir à l’article 53, 10° CIR 92 que lorsque les frais professionnels sont « manifestement déraisonnables » et présentent un caractère somptuaire. En aucun cas donc le législateur n’a souhaité laisser la porte ouverte à l’Administration de s’immiscer dans la gestion des entreprises en jugeant de l’opportunité ou du bien-fondé de ses frais professionnels, ce qui demeure interdit.

Deuxièmement, l’Administration fiscale prévoit dans son propre Commentaire administratif que le caractère déraisonnable d’une dépense ou de certaines dépenses strictement déterminées doit être apprécié au cas par cas et ne peut jamais être considéré pour toute les dépenses dans leur globalité.

Or, l’Administration fiscale estime qu’elle peut, sur base de cet article, rejeter l’ensemble des pertes d’un exercice donné et ainsi ramener le résultat de l’exercice à « zéro » lorsqu’elle considère les frais comme étant « déraisonnables ». Ce faisant, elle détourne la portée de cette disposition alors même que cette interprétation est contraire à la fois aux instructions administratives et à l’intention du législateur qui lui-même n’avait pas envisagé de telles conséquences pour le contribuable, lesquelles peuvent s’avérer très lourdes !

Si pour l’article 49 CIR92 (déduction des frais professionnel), la charge de la preuve incombe au contribuable, elle incombe en revanche à l’Administration fiscale dans le cadre de l’article 53, 10° CIR92. Or, par essence, un rejet global des pertes et donc des frais va à l’encontre de cette charge de la preuve.

La jurisprudence a confirmé que l’article 53,10° CIR 92était d’interprétation restrictive, en ce que seule la quote-part des frais considérée comme excessive pouvait être rejetée, le taxateur devant dès lors fixer lui-même la part raisonnable et la part déraisonnable des dépenses sans pouvoir rejeter les frais de manière globale. De même, il a été jugé que la disproportion entre les bénéfices réalisés et les frais exposés qui s’étend sur plusieurs années ne pouvait à elle-seule suffire à conclure au caractère déraisonnable des frais !

L’Administration fiscale a invoqué l’article 53, 10° CIR 92 pour rejeter vos pertes ? Cette rectification est contestable et nos avocats vous défendront face à cette position qui peut relever de l’arbitraire. 

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Dernière mise à jour: 15-02-24