Réduction des amendes TVA pour fraude : seul le recours préalable au droit de grâce le permet
Réduction des amendes TVA pour fraude : seul le recours préalable au droit de grâce le permet
- Le régime des amendes en matière de TVA
En vertu des articles 70 et 84 du Code de la TVA (CTVA) ainsi que de l’arrêté royal n° 41, la plupart des infractions entraînent des amendes proportionnelles, généralement à hauteur de 200 % en cas de fraude.
Bien que qualifiées de sanctions administratives, les amendes TVA sont considérées comme ayant un caractère pénal au sens de l’article 6.1 de la CEDH, ce qui implique le respect des garanties procédurales et l’existence d’un contrôle juridictionnel effectif.
Si l’administration dispose d’un pouvoir de modération en cas d’infractions non frauduleuses, aucune réduction n’est permise en cas de fraude en l’absence de recours à la procédure gracieuse.
- L’arrêt de la Cour de cassation du 25 avril 2025
L’arrêt de la Cour de cassation du 25 avril 2025 (Cass., 25.04.2025, F.22.0166.N), réunie pour l’occasion en audience plénière, vient de mettre fin à une divergence de jurisprudence au sein des chambres linguistiques de la Cour de cassation quant à la possibilité pour le juge de réduire une amende TVA infligée pour fraude, en l’absence de recours préalable au droit de grâce prévu par l’article 9 de l’arrêté du Régent du 18 mars 1831.
En l’espèce, bien que le juge d’appel ait reconnu l’existence d’une fraude, il avait réduit l’amende proportionnelle de 200 % à 100 % pour violation du principe de proportionnalité, sans que l’assujetti ait sollicité la remise gracieuse préalable auprès de l’administration. La Cour a cassé cette décision.
La Cour rappelle que l’exigence d’un contrôle de « pleine juridiction » implique que le juge puisse apprécier l’exactitude de tous les éléments relevant de la discrétion de l’administration. Toutefois, ce contrôle ne permet pas au juge de réduire une amende fixée par la loi selon un taux minimum ou fixe, dans le cadre d’une compétence liée de l’administration.
Dès lors, la seule voie de réduction d’une amende en cas de fraude passe par le droit de grâce. Le juge ne peut exercer un contrôle sur la proportionnalité de la sanction que dans le cadre d’un recours contre une décision rendue sur une telle demande.
Auparavant, seule la chambre francophone soutenait déjà que seul le recours au droit de grâce ouvrait la voie à une réduction judiciaire (Cass., 2 mars 2023).
L’arrêt rendu en séance plénière consacre donc la position francophone.
- Les conséquences de cet arrêt
L’assujetti désireux de contester une amende pour fraude a désormais deux options, mutuellement exclusives dans un premier temps :
- Soit il conteste le fond de l’infraction via un recours juridictionnel classique ;
- Soit il accepte la fraude mais sollicite la remise administrative gracieuse, pouvant ensuite faire l’objet d’un recours judiciaire.
Cependant, le cumul des deux procédures est nécessaire pour contester d’une part la réalité de la fraude, et d’autre part la proportionnalité de la sanction. Cela implique deux recours successifs, ce qui alourdit considérablement la procédure.