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TAXFLASH - LN24 - Est-ce que Colruyt paie des impôts ?

Colruyt paie-t-il des impôts ?

 

Bienvenue dans Tax Flash, votre séquence de décryptage fiscal.

2024 s’annonce comme une année électorale chargée : le 9 juin prochain, nous voterons aux élections fédérales, régionales et européennes.

Ce qui nous donnera l’occasion, dans Tax Flash, de nous pencher sur les programmes des partis politiques et des déclarations de nos responsables politiques.

 

Les récentes déclarations du PTB

Penchons-nous sur les récentes déclarations de Raoul Hedebouw, président du PTB.

Il y a quelques jours, à l’occasion des vœux du parti, M. Hedebouw, a déclaré que Colruyt payait moins d’impôt qu’une femme de ménage. Ainsi, l’impôt payé par Colruyt pour l’exercice comptable 2022-2023 (dernière année pour laquelle on dispose des comptes annuels de Colruyt) n’aurait pas dépassé 0,27 % de son bénéfice.

Alors que, comme on le sait, le taux de l’impôt des sociétés est de 25% d’impôt.

Colruyt s’est empressé de réagir en contestant les affirmations du président du PTB, et précisant que Colruyt avait payé environ 60 millions d’euros d’impôt, sur un bénéfice global d’environ 250 millions d’euros, ce qui correspond à peu de chose près à 25%.

Qui a raison ?

Pour répondre à cette question, il faut d’abord comprendre comme sont taxés les bénéfices distribués par une société, ce qu’on appelle les dividendes.

Si l’actionnaire de la société est une personne physique (vous, moi), ces dividendes seront soumis à un impôt de 30% (retenu par la société, sous la forme du précompte mobilier).

Si, par contre, l’actionnaire est une autre société (ce qu’on appelle parfois, une société holding), ces dividendes seront en principe exonérés d’impôt dans le chef de la société holding.

Qu’est-ce qui explique cette différence de traitement ? C’est très simple : parce que ces dividendes ont déjà été imposés dans le chef de la société qui distribue les bénéfices, et parce que lorsqu’ils seront distribués à leur tour par la holding à son actionnaire personne physique, ils subiront l’impôt au taux de 30%.

Imaginons une situation un peu extrême : une société appartient à une autre société qui appartient à une autre société qui appartient, à son tour, à une dernière société holding.

Si à chaque remontée de dividendes, l'impôt des sociétés est perçu au taux de 25%, il ne restera au bout du compte qu’une fraction limitée de bénéfices, sans que rien ne justifie cette imposition en cascade.

C’est ce qui explique que des bénéfices de la holding soient déduits les dividendes en provenance de sa société filiale, par un mécanisme appelé la déduction des « revenus définitivement taxés ».

 

Bénéfices de la holding v. bénéfice du groupe

Par conséquent, affirmer, comme Raoul Hedeboux l’a fait, que la holding de Colruyt n’aurait pas payé d’impôt sur ses bénéfices est correct. Techniquement, Raoul Hedebouw n’a pas menti.

Mais il omet de dire que les bénéfices de cette holding trouvent leur source dans les propres bénéfices de ses filiales, bénéfices qui ont été imposés.

Par conséquent, ce sont les bénéfices du groupe qui doivent être examinés pour s’assurer que le juste impôt a bien été perçu dans l’ensemble des filiales.

Il y a un moyen d’obtenir cette information, en consultant non pas les comptes annuels de la holding de Colruyt mais les comptes consolidés du groupe.

Ce sont ces comptes qui permettent de voir quel est le bénéfice global du groupe et l’impôt payé sur ce bénéfice :

  • Bénéfice global : 241.800.000 EUR
  • Impôt perçu sur ce bénéfice : 62.200.000 EUR (soit 25,72 %)

 

Conclusion

Prétendre, donc, que Colruyt ne paierait pas d’impôt sur ses bénéfices n’est pas correct.

Les bénéfices imposables de la holding de Colruyt ont été corrigés par le mécanisme des revenus définitivement taxés pour éviter une double imposition des bénéfices générés par les filiales du groupe.

Marco Van Hees, parlementaire PTB au fédéral, et expert en fiscalité, reconnaissait, dans une carte blanche publiée en 2022 dans le Vif, le principe de ce mécanisme, mais tout en relevant la nécessité de vérifier l’imposition des bénéfices des filiales[1].

C’est fait pour ce qui concerne Colruyt.

 

*

 

A très bientôt pour une nouvelle capsule de Tax Flash.

 

[1] M. Van Hees, « Au cœur de l’inégalité fiscale belge, les RDT (carte blanche), Le Vif, 09/11/2022.

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