La transposition de la Directive 2019/1023 : une nécessaire uniformisation du droit de l’insolvabilité
06/05/23L’actualité récente n’a pas épargné les entreprises, et encore moins celles présentant déjà des difficultés. Le contexte de ces dernières années avec la crise du Covid-19, la hausse des coûts de nombreuses matières premières ou encore la plus récente crise énergétique sont autant de facteurs qui compliquent la vie des acteurs du monde économique.
Divers secteurs sont touchés. Pour bon nombre d’entreprises belges, le chiffre d’affaires est en décroissance, tandis que les dettes augmentent, tout comme les charges courantes. Une fois les difficultés présentes, les quelques paiements effectués ne permettent que d’apurer partiellement les dettes, au travers du paiement des intérêts et des frais, mais pas du principal, lequel continue de générer des accessoires.
Cette situation, qui semble inéluctable, met à mal l’équilibre financier de nombreuses entreprises, et celles qui ne disposent pas des liquidités suffisantes voient en conséquence leur passif augmenter de manière significative.
Pour ces entreprises, le dépôt de bilan semble inévitable, et les moratoires passés, lesquels ont empêché les citations en faillite, n’ont fait que de les maintenir sous respirateur artificiel. Dans ces conditions, de nombreux jugements d’ouverture de faillite sont à craindre pour 2023.
La directive (UE) 2019/1023 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 relative, selon son nom complet, « aux cadres de restructuration préventive, à la remise de dettes et aux déchéances, et aux mesures à prendre pour augmenter l’efficacité des procédures en matière de restructuration, d’insolvabilité et de remise de dettes » est une réforme importante en matière d’insolvabilité.
Le premier considérant de cette directive énonce que « […] la présente directive vise à lever les obstacles à l’exercice des libertés fondamentales en garantissant que les entreprises viables et les entrepreneurs en difficulté financière ont accès à des cadres de restructuration préventive efficaces au niveau national, qui leur permettent de poursuivre leurs activités ; que les entrepreneurs honnêtes insolvables ou surendettés peuvent bénéficier d’une remise de dettes totale au terme d’un délai raisonnable, ce qui leur offrirait une seconde chance ; […] ».
La directive précise que la levée des obstacles à une restructuration préventive et efficace des débiteurs viables en difficulté financière contribue à réduire au minimum les suppressions d’emplois et les pertes de valeur des actifs pour les créanciers, préserve le savoir-faire de l’entreprise en difficulté et les compétences du débiteur et bénéficie donc à l’économie au sens large.
La directive fait le constat que les procédures existant dans les États membres divergent et peuvent intervenir à divers stades. Le considérant n° 4 précise : « L’éventail des procédures ouvertes aux débiteurs en difficulté financière pour restructurer leur entreprise est différent d’un État membre à l’autre. Dans certains États membres, l’éventail limité des procédures ne permet aux entreprises de se restructurer qu’à un stade relativement tardif dans le cadre de procédures d’insolvabilité. Dans d’autres, cette restructuration peut être réalisée à un stade plus précoce, mais les procédures existantes sont moins efficaces qu’elles pourraient l’être ou sont très formelles, notamment parce qu’elles limitent le recours aux accords extrajudiciaires. Les solutions préventives s’inscrivent dans une tendance croissante du droit de l’insolvabilité […] ».
Il y a donc une volonté d’uniformisation des procédures d’insolvabilité existant au sein des États membres au travers de la directive.
L’accent est aussi mis sur la détection des entreprises en difficulté, le législateur comprenant que plus un problème est détecté et traité rapidement, plus les solutions peuvent être diverses et variées. Cette volonté de détection rapide et de prise en charge des entreprises en difficulté semble opportune pour éviter des conséquences en cascade pour les créanciers impayés.
Si, comme chacun sait, la Belgique est en retard dans la transposition de cette directive, le travail législatif avance et un projet de loi a été présenté par la Chambre des représentants le 20 mars dernier.
Gageons que nous soyons sur la bonne voie car, plus que jamais, les entreprises et les entrepreneurs belges ont besoin d’un cadre législatif adapté et efficace pour leur permettre de faire face à leurs difficultés et œuvrer à la relance de l’économie du Royaume.
Le pôle « entreprises en difficulté » composé de Maîtres Damien Philippot et Martin Marinx du cabinet Solis Law Firm est à vos côtés pour y parvenir.